3e édition

Guide pratique de gestion des coopératives d’habitation


Chapitre 18
Gestion locative

Section 18.11

Résiliation unilatérale du bail

Demande de résiliation devant le Tribunal administratif du logement

En cas d’inexécution par le locataire ou par le locateur d’une ou de plusieurs de leurs obligations respectives en vertu du bail ou du Code civil, l’autre partie pourra demander au Tribunal administratif du logement la résiliation du bail (C.c.Q., art. 1863). La partie qui demande la résiliation doit démontrer que le manquement de l’autre partie lui cause à elle-même un préjudice sérieux. Dans le cas où le locateur demande la résiliation, un préjudice sérieux causé aux autres locataires peut également donner le droit de demander la résiliation du bailÀ titre d’exemples : dans le cas d’un logement à loyer modique, le fait de ne pas déclarer les revenus d’un occupant d’un logement peut constituer une cause de résiliation (Office municipal d'habitation de Grande-Rivière c. Lafontaine, 2021 QCTAL 3822); comportements agressifs répétés : Charbonneau c. Thiffeault, 2021 QCTAL 3433; refus d’accès au logement par le locataire alors que des travaux urgents doivent être effectués. (Desriveaux c. Beaudoin 2021 QCTAL 2882); comportement agressif, menaçant et totalement inapproprié, tant envers les employés de la locatrice que les autres locataires de la résidence, ayant nécessité l’intervention des services de police à au moins trois occasions (Résidence Soleil Pointe-aux-Trembles c. Lirette (2021 QCTAL 920); Location à court terme via une forme de type Airbnb avec trouble de jouissance pour les autres locataires (Timbercreek Asset Management Inc. c. Majidi Gerdeh 2021 QCTAL 704)..

De plus, la résiliation peut être demandée lorsqu’une partie ne se conforme pas à une ordonnance du tribunal d’exécuter une obligationVoir également : Sagatelyan c. Kavvouras 2021 QCTAL 1019.(C.c.Q., art. 1973).

Résiliation pour défaut de paiement du loyer

Rappelons qu’en cas d’un défaut de paiement de loyer, le locateur peut obtenir la résiliation du bail si le locataire est en retard de plus de trois semaines pour le paiement du loyer ou, encore, s’il en subit un préjudice sérieux, lorsque le locataire en retarde fréquemment le paiement (C.c.Q., art. 1971). Le locataire poursuivi peut cependant éviter la résiliation en payant, avant jugement, outre le loyer dû et les frais, les intérêts au taux fixé en application de l’article 28 de la Loi sur l’administration fiscale (chapitre A-6.002) ou à un autre taux convenu avec le locateur si ce taux est moins élevé (C.c.Q., art. 1883).

Résiliation avec préavis par le locataire

Dans certaines circonstances, la Loi autorise le locataire à mettre fin au bail avant son terme, sans le consentement du locateur et sans qu’il soit nécessaire pour lui de s’adresser au Tribunal administratif du logement. Ce sera le cas (C.c.Q., art. 1974 et C.c.Q., art. 1974.1) :

  • Lorsqu’un logement à loyer modique est attribué au locataire (ex. : HLM, PSBL-P ou PSL);
  • Si le locataire ne peut plus occuper son logement en raison d’un handicap;
  • Pour une personne aînée, si celle-ci est admise de façon permanente dans un centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD), dans une ressource intermédiaire (RI), dans une résidence privée pour aînés (RPA) où lui sont offerts les soins infirmiers ou les services d’assistance personnelle que nécessite son état de santé;
  • Lorsque le locataire doit quitter son logement en raison de la violence d’un conjoint ou d’un ancien conjoint;
  • Lorsque le locataire doit quitter son logement en raison d’une agression sexuelle, même par un tiers, si la sécurité du locataire ou celle d’un enfant qui habite avec lui est menacée.

La résiliation prend effet deux mois après l’envoi d’un avis au locateur. Elle peut prendre effet avant l’expiration de ce délai si les parties en conviennent ou lorsque le logement, étant libéré par le locataire, est reloué par le locateur pendant ce même délai.

L’avis doit être accompagné d’une attestation de l’autorité concernée (ex. : médecin, travailleur social, responsable d’un lieu d’hébergement, policier, etc.).

En cas de décès

Le décès du locataire ne met pas fin automatiquement au bail (C.c.Q., art. 1884). Lorsque le locataire décède, deux situations distinctes sont possibles :

  • Le locataire habitait seul le logement : Le liquidateur de la succession ou, à défaut, un héritier, peut résilier le bail en donnant au locateur, dans les six mois du décès, un avis de deux mois. La résiliation prend effet avant l’expiration du délai de deux mois si le liquidateur ou l’héritier et le locateur en conviennent ou lorsque le logement est reloué par le locateur pendant ce même délai (c.Q., art. 1939).

Reconduction

Le locateur peut éviter la reconduction du bail en avisant l’héritier ou le liquidateur de la succession (C.c.Q., art. 1944).

  • Le locataire habitait avec quelqu’un : La personne qui habitait avec le locataire au moment de son décès a droit au maintien dans les lieux et devient locataire si elle continue d’occuper le logement. Elle doit toutefois aviser le locateur de ce fait dans les deux mois qui suivent le décès. Si elle ne se prévaut pas de ce droit, le liquidateur de la succession ou, à défaut, un héritier, peut, dans le mois qui suit l’expiration de ce délai de deux mois, résilier le bail en donnant au locateur un avis d’un mois (c.Q., art. 1938).

Dans tous les cas, la personne qui habitait avec le locataire, le liquidateur ou l’héritier n’est tenue, le cas échéant, au paiement des services qui se rattachent à la personne même du locataire que pour la portion des services qui ont été fournis du vivant de celui-ci. Par exemple, le bail – ou un contrat distinct de celui-ci – conclu par la personne décédée incluait deux repas par jour en salle à manger. Le coût facturé au locataire pour ce service de repas se chiffre à 600 $ par mois (en plus du loyer du logement). Le locataire décède le 15 septembre en soirée. La personne qui habitait avec le locataire, le liquidateur ou l’héritier n’est alors tenue qu’à la moitié du montant normalement facturé pour le service de repas, soit 300 $ ((600 $ / 30 jours) X 15 jours).

Logement impropre à l’habitation

Le cas d’un logement impropre à l’habitation peut également donner lieu à la résiliation de plein droit du bail, soit lors de la délivrance du logement ou en cours de bail C.c.Q., art. 1914 à 1916).

Déguerpissement ou abandon du logement par le locataire 

En cas de déguerpissement du locataireOn entend par déguerpissement le fait pour le locataire de quitter son logement en emportant ses effets mobiliers, le locateur peut mettre fin au bail sans avoir à entreprendre un recours devant le Tribunal (C.c.Q., art. 1975). Le locateur pourra également résilier le bail, sans autre motif, lorsque le logement est impropre à l’habitation et que le locataire l’a abandonné sans en aviser le locateur (C.c.Q., art. 1975).

La perte du logement 

La destruction du logement, par exemple à la suite d’un incendie ou d’une catastrophe naturelle, met fin au bail, celui-ci étant devenu sans objet. Pour justifier la résiliation la destruction du logement doit être totale ou, à tout le moins, substantielle.