3e édition

Guide pratique de gestion des coopératives d’habitation


Chapitre 22
Gestion documentaire

Section 22.4

Organisation du classement

Que les documents soient imprimés ou électroniques, leur gestion ne peut être laissée au bon vouloir de tout un chacun. La gestion documentaire constitue une fonction importante dans une coopérative d’habitation et doit satisfaire à certaines règles de base.

22.4.1 - Les compétences et les outils requis

Les personnes responsables de la gestion documentaire au sein de la coopérative, à commencer par celle qui occupe le poste de secrétaire, doivent posséder ou développer certaines compétences générales :

  • Une bonne connaissance du fonctionnement de la coopérative : Pour classer correctement un document, encore faut-il savoir de quoi il traite. Par exemple, comprendre la distinction entre le statut de membre et le statut de locataire permettra de classer un bail signé dans le bon dossier – c’est-à-dire le dossier des locataires!
  • Sens de l’organisation : Être organisé signifie d’abord avoir une bonne vue d’ensemble de la tâche et comprendre le pourquoi et le comment classer les documents. Il faut également adopter des méthodes de travail adéquates et avoir en main les bons outils.
  • La rigueur : La gestion documentaire requiert d’être méticuleux et attentif. Il faut également suivre les procédures établies. Ainsi, la personne chargée du classement doit s’assurer que chaque document comporte une date ou un autre moyen de déterminer aisément à quel moment il a été créé ou reçu. Sinon, comment fixer le moment où on devra le détruire ou l’archiver?
  • La discipline : Il faut classer les documents de façon régulière, généralement tous les mois. Après deux ou trois ans de laisser-aller, la tâche risque d’apparaître comme impossible.

Une bonne gestion documentaire requiert également quelques compétences spécifiques :

  • Des connaissances de base en informatique : Sans être un ou une pro en informatique, vous devrez être en mesure d’utiliser couramment un ordinateur ainsi que des logiciels et applications courants (traitement de texte (ex. : Word), tableur (ex. : Excel) et application de messagerie électronique (ex. : Outlook)).
  • Des connaissances en gestion documentaire : Il est relativement facile d’acquérir de telles connaissances, par exemple à l’aide du présent chapitre ou en faisant de simples recherches sur Internet. Au besoin, communiquez avec votre fédération. Elle pourra vous conseiller ou même vous offrir une formation.

Vous aurez également besoin de certaines ressources matérielles :

  • De l’espace physique : Idéalement, la coopérative devrait disposer d’un espace adéquat pour classer les documents en version papier (ex. : dans une salle communautaire). Si l’accès au local peut être contrôlé (ex. : un bureau fermé à clef), c’est encore mieux. Si la coopérative ne possède pas un tel espace, vous devrez :
    • Recourir le plus souvent possible au classement sur un support électronique (ex. : ordinateur, Cloud, etc.) afin de réduire au minimum la quantité de documents en version papier;
    • En dernier recours, acquérir un dispositif de classement (ex. : classeur mobile et compact) qui peut aisément être transporté et rangé dans un logement;
    • Envisager de déposer les originaux de certains documents importants (ex. : statuts constitutifs, actes d’achat d’immeuble, acte de prêt, etc.) dans un coffret de sûreté auprès de l’institution financière avec laquelle la coopérative fait affaire.
  • Un ou des classeurs fermant à clef : Votre coopérative gère des documents comportant de l’information sensible, par exemple des renseignements personnels sur ses locataires ou les dossiers des membres. Seules les personnes autorisées doivent avoir accès aux dossiers de la coopérative.
  • Certaines fournitures de bureau : Vous devez avoir une quantité suffisante de chemises permettant d’y classer des documents en format légal (8 ½ x 14) de différentes couleurs (4 ou 5 couleurs différentes), de dossiers suspendus de mêmes format et couleur, dans lesquels sont insérées les chemises, ainsi que des étiquettes, des onglets permettant de séparer les dossiers selon leur classe, des boîtes de rangement, etc.
  • Un ordinateur : La coopérative devrait avoir un ordinateur qui lui appartient. Vous n’avez pas nécessairement besoin du modèle le plus performant ou le plus récent. Il devra néanmoins permettre une utilisation efficace des suites de logiciels bureautiques standards ainsi que d’Internet pour la recherche et la navigation. L’ordinateur doit également fournir un espace mémoire suffisant pour classer l’ensemble des dossiers et documents numérisés appartenant à la coopérative. Il est essentiel que les dossiers et documents soient protégés par un mot de passe et que l’accès en soit contrôlé. Évidemment, un ordinateur portable s’impose!

Des ordinateurs à prix abordable

Le Programme des ordinateurs pour les écoles (OPE) est un programme national pan canadien qui remet à neuf les ordinateurs donnés par les gouvernements, les entreprises privées et les particuliers afin de les offrir à un prix abordable dans les écoles, les bibliothèques, les organismes sans but lucratif enregistrés et les communautés autochtones, ainsi qu’aux personnes à faible revenu. Au Québec, la plupart des coopératives d’habitation sont admissibles à ce programme géré par l’organisme Ordinateurs pour les écoles du Québec (OPEQ), un OSBL présent à la grandeur de la province.

Les résidents à faible revenu de la coopérative peuvent également avoir accès à des ordinateurs à prix abordable par l’entremise du programme CLIC OPEQ.

  • Un appareil permettant de numériser les documents papier : Il est possible de numériser un document avec un numériseur (ou scanner). Certaines imprimantes multifonctions permettent de numériser des documents. Enfin, certains téléphones intelligents peuvent également numériser des documents, si vous téléchargez une application à cet effet.
  • Des logiciels et applications bureautiques : Il s’agit minimalement d’un logiciel de traitement de texte, d’un tableur, d’une application pour le courrier électronique et d’un antivirus.

Enfin, votre coopérative d’habitation devrait songer à se tourner progressivement vers divers services tels :

  • Un espace infonuagique pour le classement de vos dossiers et documents : Ces espaces virtuels offrent plusieurs avantages : sécurité des documents, protection en cas de sinistre (incendie, dégât d’eau, vol), gratuité pour les besoins normaux d’une coopérative d’habitation, possibilité de donner des accès ciblés aux différents dossiers, partage de documents avec les membres, etc.
  • Une adresse courriel permanente pour la coopérative : Cela permet d’assurer une continuité dans la communication par courriel entre la coopérative et les organisations ou entreprises avec lesquelles elle interagit. Il est possible et facile de créer gratuitement une adresse auprès de différents fournisseurs (ex. : Google, Hotmail, Outlook, etc.). Si votre coopérative préfère soutenir le mouvement coopératif, il est possible de réserver un nom de coop auprès de l’Alliance coopérative internationale (ACI). Dans tous les cas, assurez-vous de limiter l’accès à ces comptes aux seules personnes autorisées. N’oubliez pas de modifier l’accès en cas de changement de responsable!

Adresse de correspondance (ou postale)

La coopérative doit avoir accès au courrier qui lui est destiné. La transmission du courrier à l’adresse personnelle de la personne occupant le poste de secrétaire ou d’un autre membre entraîne des risques de perte du courrier et une gestion inutile lorsque vient la fin de son mandat ou en cas de déménagement. Afin d’éviter les changements d’adresse de correspondance, la coopérative peut, par exemple, louer une case postale ou installer une boîte aux lettres destinée uniquement au courrier qu’elle reçoit.

Sinon, assurez-vous d’aviser vos partenaires (ex. : fédération, CQCH, SCHL, SHQ, Direction de l’entrepreneuriat collectif du MEI, Registraire des entreprises, institution financière, assureur, fournisseurs, etc.) du changement d’adresse postale.

22.4.2 - Méthode de classement

L’organisation du classement repose principalement sur un plan de classification et un calendrier de conservation adéquats.

Modèles

Il existe plusieurs modèles de plan de classification et de calendrier de conservation. L’important, c’est que le ou les outils utilisés par la coopérative soient adaptés à vos besoins. Nous vous proposons un outil de gestion documentaire qui cumule dans un même tableau les fonctions du plan de classification et celles du calendrier de conservation. La coopérative peut évidemment adapter cet outil selon ses besoins, en s’assurant toutefois de respecter les règles de base et les obligations légales de la coopérative.

Plan de classification 

Le plan de classification permet d’identifier et de classer les dossiers et les documents selon un ordre logique et hiérarchique. Il doit être conçu de manière que toute personne autorisée à consulter les dossiers de la coopérative puisse s’y retrouver rapidement.

Le plan de classification est d’abord divisé en classes principales, par exemple :

  • 1000 – Administration et gouvernance
  • 2000 – Vie coopérative
  • 3000 – Ressources humaines
  • 4000 – RESSOURCES FINANCIÈRES
  • 5000 – Ressources immobilières et matérielles
  • 6000 – SERVICES
  • 7000 – Documentation

Celles-ci sont elles-mêmes subdivisées en sous-classes, par exemple :

Administration et gouvernance :

  • 1100 – Administration générale
  • 1200 – Assemblée des membres
  • 1300 – Conseil d’administration
  • 1400 – Comités

Enfin, on trouve à l’intérieur de chaque classe des divisions, par exemple :

1100 – Administration générale :

  • 1101 – Constitution et historique
  • 1102 – Structure administrative et organigramme
  • 1103 – Règlements
  • 1104 – Politiques
  • 1105 – Codes de conduite
  • 1106 – Conventions d’exploitation
  • 1107 – Autorisations de signature
  • 1108 – Planification
  • 1109 – Rapports annuels et rapports d’activité

Dans le plan de classification, les dossiers sont identifiés par un code et par un titre ou une description. Nous suggérons l’utilisation d’un code comportant 4 chiffres. Le premier chiffre identifie la classe, et le second, la sous-classe. Les troisième et quatrième chiffres identifient, quant à eux, la division dans laquelle un dossier se trouve.

Tableau classification
Exemple de classification

Dans l’exemple ci-dessus, les différents règlements de la coopérative se trouvent dans la classe ADMINISTRATION, dans la sous-classe ADMINISTRATION GÉNÉRALE et dans la division Règlements. Si vous souhaitez identifier avec plus de précision la chemise contenant le Règlement de régie interne, ajoutez une extension au code, ce qui donnera : 1103.1 Règlement de régie interne.

Un seul plan de classification!

Afin de vous y retrouver, utilisez le même plan de classification pour les documents en version papier (classeur) et les documents en version électronique (ordinateur ou espace infonuagique).

Calendrier de conservation

Pourquoi un calendrier de conservation?

La plupart des coopératives d’habitation possèdent un espace limité pour classer les dossiers de façon sécuritaire. Après 15, 25 ou 40 ans d’existence, votre coopérative a ou aura accumulé un grand nombre de documents. La conservation de cette masse de documents peut s’avérer un véritable casse-tête et risque de faire obstacle à une bonne gestion documentaire.

Évidemment, la numérisation de documents permet d’économiser de l’espace. Il n’en demeure pas moins qu’un document, quel que soit son support, ne devrait pas être conservé s’il n’a plus aucune utilité ou aucun intérêt pour la coopérative. Avez-vous vraiment besoin de conserver les six versions précédentes de votre Règlement de régie interne? Autre exemple, la convention d’exploitation qui liait votre coopérative à la SCHL est terminée depuis 10 ans. Est-il nécessaire de conserver chaque correspondance reçue de la SCHL pendant les 35 ans qu’a duré la convention?

Le calendrier de conservation indique la durée de temps pendant lequel la coopérative conservera un dossier ou un document. Il détermine également la manière d’en disposer une fois son cycle de vie achevé.

Comment fonctionne un calendrier de conservation?

Le calendrier de conservation utilise les mêmes codes et descriptions des dossiers que le plan de classification. C’est pourquoi le modèle d’outil que nous vous suggérons comprend ces deux outils dans un même tableau. En plus du code et de la description, on y trouve une colonne où est inscrite la règle de conservation, c’est-à-dire l’information permettant de déterminer la durée de vie active des documents. La colonne Disposition permet quant à elle de connaître la manière de disposer des documents une fois leur vie utile terminée.

Exemple calendrier de conservation
Exemple calendrier de conservation

Comment déterminer la durée de conservation de vos documents?

Le modèle d’outil de gestion documentaire que nous vous suggérons propose des durées de vie et des modes de disposition usuels pour la plupart des documents que possède votre coopérative. Voici néanmoins quelques règles de conservation importantes :

  • Certains documents devraient être conservés de façon permanente soit en raison de leur importance (ex. : les statuts de constitution) ou de leur intérêt pour la coopérative (ex. : les photographies du chantier de construction de votre immeuble).
  • La durée de conservation de certains documents est déterminée par la loi (ex. : vous devez conserver tous vos registres comptables et toutes les pièces justificatives pendant une période de six ans à compter de la fin de la dernière année d’imposition à laquelle ces documents se rapportent).
  • Les documents ou dossiers qui contiennent des renseignements personnels doivent être détruits lorsqu’ils ne sont plus utilisés (ex. : vous devez détruire les dossiers de membres et de locataires après leur départ de la coopérative).
  • La durée de vie active de certains documents n’est pas quantifiée en années, mais dépend de leur remplacement (ex. : votre Règlement de régie interne sera un document actif jusqu’à son remplacement par une nouvelle version adoptée par l’assemblée des membres). Une fois remplacée, l’ancienne version devrait être détruite.
  • Les documents ayant une importante valeur juridique ou opérationnelle seront conservés au-delà de l’année courante (ex. : on recommande de conserver comme documents actifs pendant deux ans les procès-verbaux du conseil d’administration).Par la suite, ils seront conservés de façon permanente.

Comment disposer des documents?

Le calendrier de conservation détermine également le mode de disposition des dossiers et documents dont la durée de conservation est achevée.

  • Archivage : Les documents en version papier que vous décidez d’archiver devraient, lorsque cela est possible, être transférés sur un support électroniqueVoir la section ''Transfert de documents en version électronique''(Chapitre 22).. Vous économiserez ainsi de l’espace et éviterez de fastidieuses « fouilles archéologiques » pour récupérer un document. Sinon, ils doivent être classés dans une boîte de rangement portant une étiquette d’identification (ex. : Comptabilité – 2015 à 2020).
  • Destruction : La destruction des documents doit se faire conformément à la loi et à la Politique de gestion documentaire. (voir la section ''Destruction des documents'' (Chapitre 22).
  • Tri : Dans certains cas, vous aurez à prendre une décision quant à la pertinence de conserver un document une fois son cycle de vie achevé. Par exemple, une correspondance datant de trois ans aura normalement terminé sa vie utile. Cependant, vous pouvez faire le choix de conserver ce document en raison de son importance ou de son intérêt pour la coopérative. C’est une question de jugement et qui comporte une part de subjectivité. Dans le doute, faites appel à un membre expérimenté ou encore, au moment de faire approuver la destruction des documents, attirez l’attention du conseil d’administration sur ce genre de document.

22.4.3 - Accès aux dossiers et documents

L’accès aux dossiers de la coopérative doit être contrôlé, à la fois pour des raisons légales et pour des motifs liés à leur bonne conservation.

  • Les dossiers papier sont conservés dans des classeurs dont les tiroirs peuvent être fermés à clef ou dans des boîtes de rangement disposées dans un local également fermé à clef. Seules quelques personnes, par exemple celles occupant les postes de secrétaire et de président de la coopérative, devraient avoir accès (ou pourraient autoriser une autre personne à avoir accès) à ces classeurs ou espaces de rangement.
  • Les dossiers et documents en version électronique sont classés dans un ordinateur ou un espace infonuagique protégé par un code d’accès ou un mot de passe.
  • L’accès à certains documents (ex. : procès-verbaux du conseil d’administration) est strictement réservé à des personnes bien définies (dans l’exemple précédent, les administrateurs).
  • La coopérative devrait déterminer pour chaque sous-classe ou division les catégories d’intervenants ayant droit d’accès aux documents.

L’outil de gestion documentaire que nous vous proposons contient une colonne permettant de préciser les personnes ayant accès aux dossiers et documents de la coopérative.